Article: Rétablissement d’une servitude de passage : un trouble illicite est-il constitué en présence d’un second accès au bien ? 

Tribunal Judiciaire d’Aix-en-Provence, 25 juin 2024, RG n°23/00382

Le Tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a rendu une ordonnance portant sur la question de la légitimité du rétablissement d’une servitude de passage, sur le fondement du trouble illicite, pour des demandeurs bénéficiant déjà d’un accès à leur bien.

Les faits de l’affaire :

Par assignation du 3 mars 2023, M. et Mme X ont assigné leurs voisins, M. et Mme Y, aux fins de rétablissement du passage de leur servitude, qui avait présumément été obstruée par eux avec l’installation d’une chaîne. Ces derniers missionneront Me Raphaël MARQUES pour les défendre dans cette procédure.

L’acte notarié des Consorts X faisait effectivement référence à une servitude de passage, mais de façon trop imprécise pour en déterminer l’emplacement exacte. 

Surtout, il est apparu dans les débats que, M. et Mme X disposait déjà d’un second accès à leur parcelle, outre le chemin litigieux.

Se posait alors la question de l’existence d’un « trouble », permettant la saisine du juge des référés, en l’absence de perturbations liées à la fermeture de l’un des deux accès à la circulation. 

En effet, la jurisprudence a déjà pu retenir, dans une situation similaire, que :

« Or, il résulte de ce qui précède que les consorts B Ag Y et X ne démontrent pas l’existence d’une servitude de passage non respectée, ni d’une impossibilité totale d’accéder à leur propriété. Ils ne font, donc, pas la preuve d’un trouble manifestement illicite ».

Dès lors, il n’y a pas lieu à référé et la décision déférée sera confirmée ».

CA Nîmes, 21 juin 2021, n° 20/02632

Et, le tribunal judiciaire retiendra une même solution : 

« Comme l’indique les époux Y, il existe un chemin au nord de la parcelle 345, sur la parcelle 222. Et, rien ne permet d’affirmer que la servitude des époux X qui suit le chemin de la servitude dite « historique » sauf sur cette portion clairement identifiée, soit en adéquation de tracé avec cette partie spécifique. 

L’autre chemin existe bel et bien, il n’est pas impraticable, ce qui tend à accréditer la thèse d’un ancien chemin d’âne, devenu servitude. Et surtout, rien ne permet au juge des référés de constater de manière certaine que l’obstruction dont se plaignent les requérants est illicite

(…) 

La demande des époux Y est rejetée, au stade des référés, aucun trouble manifestement illicite n’étant démontré. »

Ainsi, et les demandeurs bénéficiant toujours d’un accès par l’utilisation d’un autre chemin, il n’était donc pas démontré une impossibilité totale d’accéder à leur propriété, ce qui excluait par conséquent la qualification de « trouble illicite ».